vendredi 1 avril 2016

22 juillet: Querelle du souvenir




 Depuis lundi 14 mars, Anders Behring Breivik est de retour devant les tribunaux norvégiens concernant ses conditions de détention. Rappelons rapidement les faits : Anders Behring Breivik fut condamné à 21 ans d’emprisonnement suite à ses attaques terroristes perpétuées le 22 juillet 2011, l’une contre le quartier gouvernemental à Oslo, et la seconde dans un camp de la Ligue des Jeunes Travaillistes organisé sur l’île d’Utøya. Au total, 77 personnes furent tuées dans les deux attaques. Détenu en isolement à la prison de Skien, Breivik souhaite donc faire appel au motif que ses conditions d’emprisonnement sont inhumaines et enfreignent les droits de l’Homme. Depuis son ouverture, le procès a une grande répercussion en Norvège et ravive des blessures.

Le sujet de l’article ne concerne cependant pas Behring Breivik mais la polémique née de la commémoration de l’événement.
Le gouvernement norvégien, représenté par Jan Tore Sanner, ministre communal (l’équivalent des collectivités territoriales en France), et Linda Hofstad Helleland, ministre de la culture, a validé le 16 mars 2016 la nouvelle maquette prévoyant la création d’un monument en mémoire des victimes des attentats du 22 juillet. Ce projet, en chantier depuis cinq ans, a déjà avorté par deux fois faute d’accord entre le comité pour la construction d’un monument commémoratif et la population locale.
Le nouveau projet, confié à l’artiste suédois Jonas Dahlberg, prévoie la création d’un parc à Sørbråten, dans la commune de Hole (nord-ouest d’Oslo), avec des passages souterrains et d’autres, ouverts sur la mer. La population voisine se montre toujours réticente envers la création près de chez eux du monument lié au 22 juillet. Interrogés par la radio et télévision nationale, NRK, ils ont déclaré que cela ne ferait que « raviver le traumatisme de ceux qui étaient les témoins innocents de la tragédie du 22 juillet ». Les habitants autour de Sørbråten préféreraient oublier ce qu’il s’est passé ce jour-là.
Outre l’aspect psychologique, les conséquences environnementales sont également soulevées ; pour créer l’ouverture sur la mer, il faudrait en effet casser entre 3 et 4 kilomètres de roche du cap de Sørbråten pour créer le passage. Les habitants ne mâchent pas leurs mots et considèrent cet acte comme « un viol contre la nature ». La population souhaite donc intenter un procès afin de stopper le projet, alors que le ministre communal déclarait officiellement que la construction du parc avait pour but de rassembler la nation et la société norvégienne. La présidente du groupe de soutien aux victimes du 22 juillet, Lisbeth Røyneland, se dit également ravie de la création d’un tel lieu.
La tenue d’un procès contre la construction du parc reste incertaine, alors que la fin des travaux est prévue en 2017.

Claire Guyennot
L’auteure est étudiante en deuxième année de master, en norvégien, au Département d’Études Nordiques de l’Université de Caen Normandie.

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