dimanche 15 avril 2018

Bataille de Tampere, guerre civile finlandaise et musique metal

En Finlande, il y a cent ans, à l’heure où ces lignes sont écrites, un 28 mars, la ville industrielle de Tampere se trouvait au beau milieu de la guerre civile finlandaise (janvier 1918-mai 1918), un épisode du conflit qui sera nommé le « Jeudi saint sanglant ». Ce jour-là, les forces révolutionnaires rouges, commandées depuis Helsinki par le journaliste et homme politique Ali Aaltonen, occupaient encore le centre de la ville. Les forces rouges se trouvaient définitivement prises en tenaille par des attaques simultanées des forces blanches de la contre-révolution, dirigées par le commandant Carl Gustaf Emil Mannerheim depuis l’Ostrobotnie.


La prise de Tampere était d’une importance capitale pour Mannerheim qui souhaitait une victoire importante avant l’intervention des forces allemandes sur le territoire finlandais. Ces dernières stationnaient dans les pays baltes depuis le reflux de l’armée russe, en pleine débâcle lors de l’ultime année de la Première guerre mondiale (1914-1918), permettant aux forces allemandes d’avancer jusqu’aux frontières de l’ancien empire des Romanov.

Les forces rouges ne résistèrent au siège de Tampere qu’une quinzaine de jours (21 mars – 6 avril 1918). Malgré la rapidité de la prise de la région et de la ville, les deux camps souffrirent d’un nombre de pertes élevés, soit environ 800 morts côté Blancs, environ 1200 morts côté Rouges, pour des effectifs équilibrés (estimés entre 13000 et 15000 combattants de chaque côté). Avant la reddition du 6 avril, certains Rouges parvinrent à s’échapper de la tenaille blanche par les lacs encore gelés, au nord et au sud, laissant derrière eux une ville en partie détruite et une situation humanitaire catastrophique.

Il est intéressant de constater que les faits de la guerre civile finlandaise - aussi sordides qu’héroïques, suivant le regard qu’on porte sur l’événement - ne trouvent aucun écho dans la musique populaire contemporaine en Finlande, notamment dans la musique metal. Les artistes finlandais dans le metal, pourtant peu avares quand il s’agit d’utiliser des thématiques guerrières, quand cela concerne la « guerre d’hiver » (novembre 1939-mars 1940) ou encore des guerres mythifiées, voire imaginaires, dans un passé lointain, restent muets à ce sujet.

Ce silence artistique interroge. S’agit-il d’un sujet qui pèse encore sur les consciences des Finlandais au point qu’il n’y ait aucune production artistique en raison d’un consensus que tout le monde comprend et entend respecter, même parmi les courants artistiques les plus transgressifs ? Ou bien, n’est-ce pas un sujet suffisamment dans l’air du temps et attractif dans le metal finlandais, au contraire de la guerre d’hiver, qui a reçu une reconnaissance internationale, ou de lointaines guerres vikings ?

Pour conclure, il n’est pas interdit de penser qu’une production artistique, ayant la guerre civile finlandaise pour thématique, puisse naître et prospérer suite aux célébrations des cent années du conflit et de l’indépendance. Cette production rejoindrait thématiquement le travail artistique d’une poignée de groupes de metal américain, entre autres, qui s’inspirent des événements liés à la guerre de Sécession (1861-1865).


Julien Neuville
L’auteur est étudiant en master 2 à l’Université de Caen Normandie




Pour aller plus concernant la bataille de Tampere : HAAPALA Pertti, HOPPU Tuomas, KAARNINEN Mervi, SUODENJOKI Sami, TIKKA, Marko, PLANTING, Anu, Tampere 1918 - A Town in the Civil War, Tampere, Museokeskus Vapriikki, 2010. 

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