Les partis populistes de droite
sont loin d’être connus pour leurs politiques environnementales. Néanmoins, si
ce thème politique n’est pas au cœur de leur idéologie, son importance croît
progressivement. comme l’ont démontré les dernières élections législatives en
Finlande[1], les
débats politiques ont tendance à s’orienter de plus en plus sur la question
climatique. Ces préoccupations environnementales ne sont par ailleurs pas si récentes,
puisqu’en Finlande les premiers programmes de partis politiques sur les
énergies et/ou l’environnement remontent aux années 1970, décennie marquée par
les chocs pétroliers.
Le premier parti politique
finlandais à avoir publié un programme d’écologie fut un parti populiste, le
Parti Rural de Finlande (prédécesseur du Parti des Finlandais[2]) en
1978. Ce programme était particulièrement novateur pour l’époque puisque les
mouvements écologiques débutaient seulement dans ces années-ci[3]. D’autres
partis politiques, tel que le Parti social-démocrate ou la Ligue démocratique
du peuple finlandais (communiste), ont abordé la question des énergies, mais plus
dans une critique anticapitaliste et en promouvant des énergies accessibles pour
toutes les classes sociales, dans un contexte économique marqué par les chocs
pétroliers des années 1970. Concernant le sujet des énergies, Veikko Vennamo[4], le
leader historique du Parti Rural de
Finlande, était un opposant farouche au nucléaire, alors qu’à l’heure actuelle
le Parti des Finlandais considère que le nucléaire doit être « la colonne
vertébrale de la production d’électricité ».
Jusque dans les années 2010, le
Parti des Finlandais portait un intérêt limité à la question écologique. La
politique environnementale du parti a connu un tournant récent, en 2016, quand le
parti a par exemple critiqué les éoliennes pour les dangers que ces dernières
pourraient causer sur la santé humaine et celle des chauve-souris. Cette
critique totalement infondée et réfutée par l’institut national de la santé, était
orientée contre la construction d’éoliennes et servait principalement une
stratégie discursive populiste[5],
et elle était aussi présente dans leur programme pour les élections municipales
de 2017[6].
Dans la dernière campagne pour
les élections législatives, le Parti des Finlandais, a accentué son opposition
au discours « d’hystérie environnementale » des autres partis. Un des
slogans de leur programme de politique environnementale pour les élections de
2019 était « une cheminée d’usine en Finlande est une action
écologique ». Un des arguments derrière cette phrase est que selon eux les
industries en Finlande polluent moins que dans des pays moins respectueux de
certains accords environnementaux. Par ailleurs, dans ce programme, la nature est
évoquée à travers des paysages typiquement finlandais qui sont à protéger,
rejoignant ainsi un esprit national-romantique[7], alors
que les autres partis politiques (et le Parti Rural de Finlande en son temps) parlent
de la planète de manière générale. La rhétorique nationaliste est donc
sous-jacente aussi dans cette question politique.
Un autre point plus inquiétant du
programme actuel de politique environnementale du Parti des Finlandais est
qu’il sert aussi leur thème de prédilection : l’immigration. Effectivement,
selon leur programme, l’immigration de personnes des pays en voie de
développement vers le Nord est une source de pollution, car ces immigrés
s’adaptent au mode de vie occidental de surconsommation… En plus de refuser ces
migrants sur leur territoire, une des solutions prônées par le parti pour
lutter contre le réchauffement climatique et l’immigration est donc la
régulation des naissances dans ces pays par un accès à l’éducation des femmes.
Enfin, cette radicalisation de
leur discours fait écho à certaines idées de l’extrême droite néonazie sur
l’environnement. Dans l’idéologie de l’extrême-droite la question
environnementale est ancrée depuis longtemps[8],
notamment avec l’éco-fascisme dont par exemple l’auteur des attentats de
Christchurch s’est revendiqué. Il existe également dans le discours
d’extrême-droite une critique du discours écologiste des partis politiques en
place, considérés comme faisant partie d’une conspiration organisée.
Marie Cazes, l’auteure est
doctorante en science politique à l’Université de Jyväskylä.
[2] Le
Parti Rural de Finlande-Suomen Maaseudun Puolue (populiste centre-gauche) fait
faillite en 1995 et, juste après ses anciens membres créent le Parti des
Finlandais - Perussuomalaiset.
[3] Les
Verts devient un parti politique en 1988 en Finlande, néanmoins deux députés
issus d’un mouvement écologiste sont élus en 1983. Le mouvement avait commencé
de manière marginale dès 1976 et pris de l’ampleur en 1979 avec la protestation
contre l’asséchement du lac de Koijärvi.
[4]
Veikko Vennamo (1913-1997), fonda le Parti Rural de Finlande en 1959 et restera
à la tête du parti jusqu’en 1979, date à laquelle il passe le pouvoir à son
fils, Pekka Vennamo. Veikko Vennamo a été député entre 1945 et 1962 et de 1966
et 1987.
[5] Les
chercheurs Niko Hatakka et Matti Välimäki ont publié un chapitre sur la
rhétorique anti-environnementale utilisée par le Parti des Finlandais https://www.taylorfrancis.com/books/e/9781351104043/chapters/10.4324/9781351104043-9
[6] Voir
leur programme (en anglais) https://www.perussuomalaiset.fi/wp-content/uploads/2013/12/Finnish_working_day_is_the_starting_point.pdf
[7] La
même rhétorique s’observe chez les Démocrates de Suède.
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