mardi 1 octobre 2019

Les femmes en politique : une vitrine de l’égalité en Finlande ?


La Finlande a été pionnière dans les droits politiques des femmes et cette histoire se ressent toujours à l’heure actuelle puisque la vie politique finlandaise connaît une forte féminisation. La présence des femmes et des jeunes au parlement a effectivement beaucoup augmenté lors des dernières élections législatives[1]. Le constat est le même dans le nouveau gouvernement. La fin d’une coalition conservatrice et l’arrivée au pouvoir de la gauche (coalition entre les sociaux-démocrates, la gauche, les verts, le centre et le parti des svécophones), a mené à un gouvernement composé de 19 ministres dont onze femmes parmi lesquelles cinq sont trentenaires. Ces changements ont par exemple été commentés lors de l’annonce du budget annuel par Ville Niinistö (député européen et ancien président des Verts), sur son compte Instagram[2], où il compare la différence entre l’ancien gouvernement de Sipilä et le nouveau gouvernement de Rinne.



Depuis plusieurs décennies les femmes ministres en Finlande se voient attribuer les portefeuilles des affaires sociales, de l’éducation ou d’autres postes considérés comme secondaires mais également les ministères régaliens. A l’heure actuelle, les postes de ministre de l’intérieur, de ministre de la justice et de ministre des affaires économiques sont par exemple pourvus par des femmes.

Cette tendance à la féminisation et au rajeunissement dans la politique finlandaise s’est aussi remarquée lors des élections de nouveaux leaders dans deux partis politiques présents au gouvernement. Maria Ohisalo (34 ans), ministre de l’Intérieur a été désignée présidente des Verts depuis juin et Katri Kulmuni (32 ans), ministre des affaires économiques a été élue à la tête du Parti du Centre, un parti plutôt conservateur, début septembre. Pour le moment seuls deux partis présents au parlement n’ont pas eu de femme à leur tête, le parti de la Coalition nationale (droite) et le parti des Finlandais (populiste de droite radicale). Une autre ministre finlandaise est par ailleurs en congé maternité pour un an[3] . L’égalité homme-femme dans la vie politique finlandaise semble donc acquise.


Néanmoins, en dépit de cette féminisation de la vie politique finlandaise et de l’arrivée de jeunes femmes (et d’hommes) féministes et engagés sur les questions d’égalité, la Finlande reste un des pays de l’Union européenne les moins sûrs pour les femmes.

En effet, le nombre de violence faites aux femmes est un des plus élevés de  l’Union européenne[4] et, proportionnellement, plus de femmes meurent de violences domestiques qu’en France[5]. De plus, la majeure partie des femmes victimes de violences, notamment de violences sexuelles, ne portent pas plainte et très peu d’agresseurs sont condamnés par la justice finlandaise.  Malgré le discours féministe de nombre de (nouvelles) députées élues (ou réélues), très peu ont évoqué ce problème sociétal, à croire que le sujet reste tabou dans le débat publique et politique. Néanmoins la question du changement de la définition du viol dans la loi a fait l’objet d’une initiative populaire[6] et est à l’heure actuelle en commission parlementaire. Le programme gouvernemental évoque également un plan à venir contre les violences domestiques et les violences faites aux femmes[7], ses contours restent cependant encore flous.


Il reste donc à espérer que cette nouvelle génération de femmes dans la politique finlandaise améliore enfin la condition des femmes dans la sphère domestique.





Marie Cazes – L’auteure est doctorante en science politique à l’Université de Jyväskylä.



[1] 85 femmes ont été élues sur les 200 députés et l’âge moyen a baissé pour passer à 47 ans, 11 députés ont moins de trente ans.  Cf un des précédents billets http://vuedunord.blogspot.com/2019/05/resultats-des-elections-parlementaires.html


[3] Pour l’anecdote, au tout début des années 2000, le premier ministre Paavo Lipponen avait pris un congé paternité après la naissance de sa deuxième fille.



[6] En Finlande les initiatives populaires sont des propositions de lois qui doivent recueillir la signature d’au moins 50 000 citoyens pour être amener au parlement où elles sont débattues. Elles existent depuis mars 2012 et sur les 25 déjà effectuées seules deux ont été votées par le parlement et quatre sont actuellement en attente.  


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