lundi 2 novembre 2020

La poste finlandaise, l’intelligence artificielle et la diversité de la langue finnoise

 Au début de l’automne, Posti, la poste finlandaise, a lancé une campagne de communication pour la nouvelle interface de son site Internet dans laquelle est utilisée une langue qui se veut « proche des gens » et « amicale[1] ». Le problème est que la langue utilisée est considérée comme exclusive pour la majorité de la population. La langue finnoise est en effet loin d’être homogène. En témoigne une autre campagne, cette fois pour le développement d’intelligence artificielle en finnois, visant à inciter les Finlandais à « donner leur langue[2] ».

La nouvelle interface de Posti a suscité la critique pour employer une langue parlée qui est plutôt utilisée par les jeunes générations du sud du pays dans laquelle ne se reconnaît pas une grande partie des Finlandais. Il est effectivement attendu d’un service public comme la poste d’être accessible à tous et pour tous. Ainsi garder un finnois standard dans les services numériques de la poste aurait été plus logique que prendre une des formes de langue parlée. En effet, le finnois distingue la langue standard, enseignée à l’école et utilisée dans les médias et les institutions de la langue parlée qui regroupe les différents dialectes, patois et argot.

Le finnois a beau être une petite langue comptant 5 millions de locuteurs natifs[3], la diversité des dialectes est bien présente. Ces dialectes du finnois se divisent en huit aires géographiques et se divisent encore au niveau communal[4]. Chaque dialecte utilise une grammaire et un vocabulaire qui lui est propre et auxquels se joint souvent un accent. Si les dialectes finnois sont plus fortement présents dans les zones rurales et chez les personnes âgées, ils sont aussi en usage dans les grandes villes, où l’argot ajoute une différence sociale aux différences régionales. L’intercompréhension peut parfois s’avérer difficile.

C’est cette diversité de dialectes et d’accents qui a mené à une campagne de collecte pour le développement de future intelligence artificielle en finnois. A l’heure actuelle, les technologies de reconnaissance vocales sont sous développées dans les langues comptant peu de locuteurs. Afin de développer ces technologies en finnois, il faut une base de données suffisamment vaste pour que chaque fennophone, indépendamment de son origine ou de son âge, soit compris et puisse y accéder [5].

 

Marie Cazes – L’auteure est doctorante en science politique à l’Université de Jyväskylä



[2] Le nom de la campagne se nomme « donnez votre langue » (https://yle.fi/aihe/lahjoita-puhetta )

[3] Le finnois est la langue maternelle de plus de 4,8 millions de Finlandais mais est aussi présente en Suède où elle a un statut de langue minoritaire.

[4] Voir https://www.kotus.fi/files/1920/murrealueet.pdf et Suomen murrekirja. Erkki Lyytikäinen, Jorma Rekunen et Jaakko Yli-Paavola (dir). Gaudeamus, 2013.

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