« Sommaren är kort » (l’été est court) chantait le
suédois Thomas Ledin dans un tube qui passait sur toutes les ondes dans les
années 80 dans les pays nordiques et qu’on entend toujours de temps en temps,
dans sa version originale ou sous forme de reprise (elles sont nombreuses).
Cette popularité tient peut-être au fait que le chanteur a su toucher sur une
corde sensible : l’été est effectivement plus court à Stockholm qu’à
Paris, et plus on monte vers le nord, plus il se raccourcit.
L’auteur finlandais Yrjö Hirn écrivait dans un de ses textes
sur le jour où l’on sent l’été basculer vers l’automne, le jour où la mer est
d’un bleu plus foncé parce que déjà plus froide et le premier frisson de
fraîcheur se mêle subrepticement aux rayons de soleil et leur donne un ton plus
pâle. Ce jour-là vient chaque été ; il marque la fin d’une saison de repos
et de farniente qui semblait interminable ; il tourne les regards vers
l’automne et rouvre une nouvelle temporalité, celle du travail, des devoirs et
des responsabilités. Un moment de mélancolie donc, mais aussi de renaissance à
la vie active.
L’auteur ne situait pas ce jour sur le calendrier. Mon
expérience personnelle le situe vers la deuxième semaine d’août. Vu de France,
c’est bien tôt, la rentrée étant ici au début de septembre. On défait les
valises et retrouve les amis à Paris ; à Stockholm, l’été n’est plus qu’un
souvenir lointain.
Cette différence de rythme – qui est aussi une différence
des expériences intériorisées, des formes de vie, des rites de la vie
sécularisée – est sans doute un des facteurs qui distinguent les pays nordique
des pays méridionaux. On peut se demander si le mot ‘été’ possède la même
signification dans ces deux aires culturelles. Dans le nord, l’imaginaire de
l’été n’est pas uniquement marqué par la chaleur, mais aussi et même davantage
par la lumière tant mise en valeur par Krøyer, Bergh, Munch et les autres
peintres du tournant du 20e siècle.
Cette idée nous permet peut-être de contredire Ledin et son
triste constat. Si l’on retient la lumière comme le critère principal de l’été,
la douce saison n’est peut-être pas si courte dans le Nord : les jours commencent
réellement à s’allonger vers le 15 mai.
Dans un monde idéal, on partirait en vacances avec les nordiques
et rentrerait avec les Français.
Bienvenue dans la 2e saison du blog Vue du Nord !
Harri Veivo
L’auteur est professeur au Département d’Études Nordiques de
l’Université de Caen Normandie.
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